Par Daphné Bathalon

Petits Bonheurs a 10 ans et le festival se porte plutôt bien! Sa programmation, qui prenait son envol ces derniers jours, accorde encore cette année une belle place au théâtre pour les tout-petits et les un peu plus grands. Des compagnies d’ici, de France, d’Espagne, d’Allemagne et de Belgique présenteront des productions, MonThéâtre en verra quatre pour vous. Voici les deux premiers : Fragile et KubiK.

FRAGILE

Arrivé tout droit de France, Le Clan des Songes apporte dans ses valises un petit bijou de spectacle qui réjouit tant les petits que les grands spectateurs de Petits Bonheurs. En une quarantaine de minutes, Fragile nous fait vivre un voyage véritablement plein de rebonds et de surprises.

fragile-014Une longue ligne blanche traverse lentement la scène, créant un pont entre cour et jardin. Sur cette ligne parfaitement droite, un petit personnage au visage très expressif et au drôle de chapeau rouge s’avance, traînant derrière lui une valise presque aussi grosse que lui. Il progresse d’abord avec énergie, puis de plus en plus péniblement alors que le vent se fait violent. Où va-t-il ainsi? Part-il en voyage? Revient-il à la maison? Le pauvre voyageur n’est pas au bout de ses peines…

Spectacle sans paroles où un seul personnage se retrouve confronté à une ligne droite qui se révèle totalement indisciplinée, Fragile rappelle par beaucoup d’aspects La linea. Tout comme dans cette vieille série animée italienne, le décor surgit chaque fois de la ligne elle-même : une vallée se creuse, une vague s’élève, un papillon s’envole ou une maison se dessine. Mais dans Fragile, pas de narrateur ou de dessinateur pour sauver la mise du personnage (beaucoup plus aimable que celui de La Linea et certainement plus silencieux!), qui doit trouver des solutions pour franchir chacun des obstacles que la route facétieuse lui oppose.

fragile-016Avec Fragile, Le Clan des Songes exploite avec beaucoup de plaisir et d’humour les mille et une possibilités offertes par une simple ligne droite. Tour à tour, la ligne du chemin se brise, se fait balançoire ou accordéon, s’amollit, se dresse tel un mur, éjecte sans merci le voyageur, l’enferme, le déséquilibre ou le berce. Toutes ces réactions inattendues font la joie du public, qui tend le cou pour ne rien rater des nouvelles épreuves rencontrées par le personnage. La musique de Laurent Rochelle vient, quant à elle, à la manière des trames sonores des films muets, ponctuer chacune des mésaventures du héros et donne même un caractère très coloré à la route capricieuse. Cette bande sonore très réactive accompagne chacune des actions du voyageur et traduit en quelques notes pour le public la curiosité, la peur, la surprise et toutes les autres émotions vécues par le voyageur.

Ce personnage à lui seul forme le cœur de ce spectacle adorable et charmant. Manipulé avec habileté et minutie, cette marionnette toute en rondeurs semble littéralement danser sur la ligne du chemin. Cachés dans l’ombre, ses comédiens marionnettistes lui donnent vie, ainsi qu’à la route, et font de lui un véritable équilibriste, toujours confronté à ses propres limites dans son petit univers sens dessus dessous dans lequel il faut faire bien attention à où on pose les pieds…

KUBIK

Le KubiK du Théâtre de la Guimbarde et du Teatro Paraiso est en fait un jeu de blocs géants que deux comédiens manipulent d’abord avec prudence, puis avec de plus en plus d’inspiration. Ils déplacent les blocs, les empilent, les font glisser au sol, les entrechoquent ou les emboîtent. Avec ces blocs blancs, ils construisent des édifices et des structures qu’ils envoient valser l’instant suivant, au gré de leurs envies, comme des enfants.

e.KubiKG.RChaque tableau de KubiK fait d’ailleurs écho aux jeux d’enfants, comme ces blocs de bois aux formes variées qu’on empile, mais aussi au plaisir qu’on prend à démolir ce qu’on vient de construire, à dérober à d’autres en clamant « C’est à moi! » les blocs convoités pour former la pile la plus haute ou à se poursuivre dans un amusant jeu de cache-cache. La curiosité et le plaisir des interprètes Gwennaëlle La Rosa et Geoffrey Magbag sont contagieux, si bien que même les adultes se laissent prendre au jeu.

r.KubiKG.RSpectacle exploratoire pour les tout-petits, KubiK se déploie avec lenteur dans l’espace. Au fil des constructions et des transformations suggérées par les blocs et les comédiens, l’attention du jeune public est tour à tour attirée par les sons et les projections sorties d’intrigantes boîtes à images. Chiens, vaches et trains apparaissent ainsi, au grand bonheur des enfants, et se baladent sur les blocs que les comédiens empilent pour former autant de bâtiments et de lieux, du viaduc ferroviaire à la maison en passant par la forêt, les pâturages… et un aquarium. Projections et sons alimentent la petite magie de ce spectacle tout en simplicité.

De menus pépins techniques sont malheureusement venus ralentir la représentation du dimanche 4 mai, ce qui a quelque peu miné le rythme du spectacle, dont le dernier quart a semblé de trop pour le niveau d’attention des tout-petits. Il faut dire que, long de près de 40 minutes, KubiK requiert déjà une bonne écoute de la part des enfants de cet âge.

Tagged: , , , , , , , ,

Leave comment